10 octobre 2009

Vive la Rue !

"les événements les plus importants sont ces petites choses qui arrivent dans la rue"
george brecht.


la Rue !

posée en questions par les artistes de la Biennale de Lyon.
et tout d'un coup, on se dit que le projet Branks et que le projet de questionner la Rue en tant qu'espace public, en tant que lieu de rencontre, en tant que lieu d'oublis ou de surprises, en tant que vibrant endroit où l'incongruité peut faire réfléchir, ce projet d'avenir donc, est vraiment un projet d'actualité.
à la Biennale de Lyon on y voit de la danse "quotidienne" jouant les paysages urbains, on y voit le télescopage d'une nature "sauvage" avec la Rue "civilisée", on y voit l'indifférence face à l'anonymat, on y voit la possibilité de changer les rapports de dimension (un ridicule petit événement produit une énorme rupture), on y voit la réappropriation de l'ordre visuel, on y voit l'invisible monde "hors de"....
décidément. quel plaisir de sentir que cette question de la Rue est au centre de beaucoup de préoccupations, et que le projet Branks, surfant lui sur la contradiction animation-art est sur une voie qui pose aussi une question. à sa manière.
un projet aux allures parfois de Cheval de Troie. de jolies girafes font des choses rigolotes dans la rue. mais finalement à qui est cette Rue ? vois-je vraiment la Rue ? le son de cette Rue est il simplement un son de plus dans cette rue ou un son appartenant à cette Rue modifiée, transformée, ré-enchantée.

notre ré-enchantement de la Rue ressemble au besoin de lui donner du sens, mais aussi de la faire voler (en éclats), de la faire sonner et de danser encore et encore avec cette Rue neutralisée par un regard quotidien qui l'aplatit.

et puis quoi ?
... partager une question sur cet environnement si "naturel".

aa


















Rencontre avec Hou Hanru, commissaire de la Biennale de Lyon 2009:

Ce titre, Le Spectacle du quotidien, évoque quelque chose de très contradictoire. Pouvez-vous nous éclairer ?

HH : J'ai tout de suite proposé ce titre à Thierry Raspail (Directeur artistique de la Biennale de Lyon), dès le début de mon projet.
Aujourd'hui dans le monde où l'on vit, pour exister il faut être dans le spectacle, c'est la condition dans laquelle on vit. Tout est spectacle, n'importe qu'elle image dans un magazine, une exposition... et d'autre part dans le monde, on trouve ce que l'on appelle « le quotidien », qui est un terrain vivant, mouvant, un terrain où les gens inventent de multiples choses et essaient de résister à cette logique implacable de consommation, dont le spectacle est l'incarnation.
Dans la biennale, l'idée est d'utiliser « le spectacle » pour mettre le spot ligth sur ce monde invisible du quotidien ou des choses se créent chaque jour.

Quel est le projet de cette Biennale avec ce thème si global qui semble tous nous concerner ?

HH : Le projet de cette édition est de proposer aux gens de réfléchir sur le pourquoi de l'art. Tout est spectaculaire, tout est encadré par un carcan de consommation, de superficialité, de marché ou d'institution. La Biennale, c'est la tentative de retrouver le lien très proche entre la création artistique et la vie de chacun.
Il ne s'agit pas seulement de faire plaisir au gens en faisant une biennale sur la vie de tous les jours, cette proposition est aussi philosophique. Le monde est vraiment divisé en deux choses, l'une très visible, le spectacle, et l'autre invisible qui est le monde quotidien. Les artistes cherchent à s'inspirer de l'expérience de l'existence.
Je pourrais dire pour résumer que le centre du projet est vraiment de se dire qu'après 20 ans d'existence de la Biennale, nous sommes aujourd'hui dans une période ou il faut vraiment repenser ce rapport entre les artistes, l'art et les gens pour que la cohérence entre le monde de la création et la société continue d'exister.

Pouvez-vous nous expliquer comment l'on conçoit une exposition de cette envergure, avec 60 artistes, 4 lieux d'exposition, et une thématique aussi complexe ?

HH : la Biennale est construite selon un modèle qui intègre plusieurs dimensions, parce que le thème recouvre plusieurs facettes. J'ai donc organisé la Biennale selon 5 piliers qui se retrouvent facilement au fil de l'exposition.
Quand vous aller découvrir Le spectacle du quotidien, vous allez explorer « La Magie des Choses », qui vous propose le travail d'artistes qui modifient des objets, des situations du quotidien en de nouveaux horizons esthétiques et posent ainsi des questions d'ordre social, historique et politique. « L'Eloge de la dérive » s'intéresse aux artistes qui interviennent dans l'espace urbain et créent des formes artistiques qui résistent à l'ordre et aux contraintes spatiales.
« Vivons ensemble » explore le dialogue entre la ville et les communautés qui l'habitent, alors que « Un autre monde est possible » reçoit la parole d'artistes qui examinent la réalité de façon critique et imaginent de nouveaux ordres sociaux parfois utopiques.
Très proche de ce dernier pilier, il existe un projet qui s'appelle « Veduta » et qui inverse la proposition habituelle de l'art. Au lieu de faire venir le public voir des œuvres d'art, on fait aller les œuvres d'art vers le public et ce dans des quartiers en renouvellement urbain. Veduta, c'est en réalité la Biennale près des gens, chez eux. En proposant des expériences inédites autour de l'art contemporain, on essaie de nouer un dialogue, de parler d'art ou de tout simplement le regarder.

Vous semblez très sensible à l'engagement des artistes, à un lien entre l'humain et l'art...

HH : Toutes les expos que j'ai faite intègrent une dimension directement liée avec la ville, à la rue, à la façon dont les gens organisent leur propre vie leur quotidien. Je considère comme une réelle nécessité le fait que les artistes se réengagent dans la vie des gens.
Nous devons intégrer dans notre démarche un dialogue dans un débat, avec les types de public qui ont différents accès à ce genre de projet intellectuel. Nous ne pouvons pas faire de l'art en étant déconnecté de la société et de ce qu'elle vit.

Et comment dans cette logique là, vous voyez votre rôle de commissaire?

HH : Selon moi, je ne fais pas seulement des expositions. Je cherche un sens, un sens à la vie, et je propose une réflexion en particulier à travers les projets artistiques, pour favoriser certaines idées.
Etre « curator », ce n'est pas seulement inventer la meilleure exposition du monde... Une exposition n'est pas une fin, c'est le début d'un long processus pour proposer des idées pour l'avenir, pour la société. Ce n'est pas seulement une représentation d'objets, une mise en scène mais c'est un cadre de départ pour réfléchir à ce que nous sommes et ce que nous faisons là.

Comment choisissez-vous les artistes que vous exposez, par exemple ceux de cette biennale ?

HH : Un titre et un projet comme celui là, ça ne tombe pas du ciel ! Il résulte tout simplement d'une sorte articulation entre une recherche, un cadre théorique mené depuis un long moment et une grande partie de pratique et de connaissance des artistes. Je travaille beaucoup avec les artistes, j'apprends auprès d'eux, j'échange avec eux. J'en ai choisi certains que je connais bien, que je trouve essentiels puis j'ai fait de nouvelles recherches, j'ai ouvert des horizons, c'est mon travail de tous les jours de chercher des artistes ! J'ai donc aussi invité des artistes que n'avais jamais rencontrés.